


Prix Pulitzer 2020
Dans la Floride ségrégationniste des années 1960, le jeune Elwood Curtis prend très à coeur le message de paix de Martin Luther King. Prêt à intégrer l’université pour y faire de brillantes études, il voit s’évanouir ses rêves d’avenir lorsque, à la suite d’une erreur judiciaire, on l’envoie à la Nickel Academy, une maison de correction qui s’engage à faire des délinquants des « hommes honnêtes et honorables ».
Sauf qu’il s’agit en réalité d’un endroit cauchemardesque, où les pensionnaires sont soumis aux pires sévices. Elwood trouve toutefois un allié précieux en la personne de Turner, avec qui il se lie d’amitié. Mais l’idéalisme de l’un et le scepticisme de l’autre auront des conséquences déchirantes.
Traduit par Charles Recoursé.

La chronique de #Esméralda :
Je découvre pour la toute première fois la plume de Colson Whitehead. Si UNDERGROUND RAILROAD a fait beaucoup parlé, NICKEL BOYS va en être de même. Deux Prix Pultizer pour un auteur qui, sans doute, confirme son talent d’orateur.
Basé sur des faits réels comme tant qui ont jalonné cet immense pays, la Nickel Academy est le fleuron d’un ségrégationnisme qui en 1960 fait toujours des ravages. Lisa Parks, Martin Luther King, tout autant de figures qui clament haut et fort les injustices raciales. C’est dans cet esprit là que Elwood Curtis a été élevé. Sa grand-mère, femme dévouée, aimante et d’une honorable justesse, est prête à touts les sacrifices pour le bonheur de son petit fils. Elwood est un jeune homme curieux qui aime apprendre, un peu naïf. Il dévore les livres et les paroles de Martin Luther King dans lesquelles il y trouve beaucoup d’espoir. Rentrer à l’université est son rêve et il aura fallu de peu pour qu’il se réalise. Au mauvais endroit au mauvais moment et sa vie bascule en enfer. Jugé et condamné à intégrer la Nickel Academy, Elwood ne voit que le meilleur. Pourtant sous ce verni qui n’a rien de flamboyant se cache l’horreur, l’humiliation, les coups, les manipulations, les privations et le désespoir. Il y connaît le fouet, les lieux sordides qui anéantissent peu à peu sa lumière. Pourtant il suit les recommandations à la lettre, se plie aux règles, ne créent pas de débordements, malgré cela le pire arrive. Il y fait une rencontre déterminante, une de celles qui marque le corps et l’âme, Turner. Un jeune homme qui ne croit plus en rien, les petites magouilles et la survie sont devenus son quotidien. Le temps s’écoule, morne et destructeur, jusqu’à ce jour fatidique.
Voici une histoire douloureuse et poignante portée par une plume qui ne peut pas laisser indifférente. Une histoire qui déchire l’âme en une multitude de morceaux. Les mots s’écoulent telle une triste réalité exorcisant l’horreur, l’injustice de n’être qu’un noir parmi tant d’autres. Un roman puissant, intense, où les secondes valent une éternité. Un roman court qui vise l’essentiel. Un orateur tourmenté, anéanti qui crie les blessures invisibles, qui hurle et vomit l’indescriptible. Souvenirs souverains au cœur d’une vie qui ne ressemble plus à aucune. Devoir de mémoire qui s’étiole au grès de nouveaux slogans modernes. Au cœur de l’Amérique de Trump, Colson Withehead abat son poing sur la table et joue carte sur table, devenant un porte parole dont ses mots reflètent sa pleine sagesse.
Un roman à découvrir inévitablement et incontestablement.
L’avis de #Lilie : J’avais beaucoup entendu parler de Colson Whitehead, j’ai même « Underground railroad » dans ma pile à lire, mais jusqu’à la sortie de son dernier roman, je n’avais pas pris le temps de le découvrir. J’ai comblé cette lacune grâce à un partenariat entre le Picabo River Book Club et les éditions Albin Michel et est découvert un roman fort, marquant, qui ne peut laisser le lecteur indifférent.
Nous faisons connaissance avec le jeune Elwood. Élève brillant, idéaliste, il vit en Floride ségrégationniste mais veut croire que le discours de Martin Luther King ou l’évolution des lois conduira à une égalité entre les blancs et les noirs. Victime d’une erreur judiciaire, il va découvrir la Nickel Academy et les aspects les plus sombres de l’âme humaine. Son idéalisme et son désir de justice survivront-ils à ce séjour ? La société américaine est-elle prête pour plus d’égalitarisme ?
Elwood est un protagoniste très attachant, qui m’a beaucoup touché car c’est un idéaliste, qui pense que le changement des lois entraînera automatiquement une évolution des mentalités. Pourtant, l’âme humaine n’est pas ainsi constituée et il va se rendre compte que l’égalité au sein de la société américaine est une utopie. A Nickel, il va découvrir un environnement violent, basé sur l’arbitraire et pas vraiment sur le mérite. Adepte de l’excellence, il va essayer de s’élever au-dessus de la médiocrité et de faire entendre sa voix… mais à quel prix ?
Beaucoup le disent, je le confirme ! La plume de Colson Whitehead est percutante, directe et sans filtre. Cette histoire, tirée d’un fait réel, m’a, à de nombreux moments, glacé le sang. Très visuelle, l’écriture de l’auteur nous rend témoin de cette époque où l’égalité ne semblait pas à l’ordre du jour. Elle nous montre aussi à quel point l’être humain peut être cruel dès qu’il a un peu de pouvoir. Le sentiment d’injustice est fortement présent et ne peut que révolter le lecteur. A la lumière de l’actualité, ce roman trouve un fort écho et montre à quel point le chemin à parcourir est encore long.
Récompensé par le prix Pullitzer 2020, ce titre de la rentrée littéraire est, sans nul doute, un incontournable pour tous les amoureux de justice et d’égalité. Il met en lumière l’horreur de la Nickel Academy mais aussi l’importance de la force de caractère et des valeurs comme le travail.

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